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CHAPITRE VI.

Les délits politiques relatifs et le principe de la non-extradition, d'après les traités internationaux.

»

Le droit des gens actuel n'exclut pas seulement de l'extradition les délits purement politiques, mais aussi, d'une manière générale, tous ceux qui, revêtant à la fois les caractères d'une infraction politique et d'une infraction de droit commun, peuvent être compris sous la qualification de délits politiques relatifs. C'est ainsi que quelques traités d'extradition, après avoir disposé que « les crimes et délits politiques sont exceptés de la présente convention, ajoutent à cette clause la suivante: « La même exception s'applique aux faits (et aux abstentions) qui leur sont connexes. » Tel est le cas du traité conclu en 1874 par la monarchie austro-hongroise avec la Russie (art. 4), du traité entre la Belgique et le Brésil de 1873 (art. 9), du traité entre la Belgique et le Portugal de 1875 (art. 5) (1), du traité entre la Belgique et les Pays-Bas de 1877 (art. 6), du traité entre l'empire allemand et le Brésil de 1877 (art. 6), du traité entre les Etats-Unis d'Amérique et l'Espagne de 1877 (art. 3), du traité franco-anglais de 1876 (art. 5) (2), du traité franco-espagnol de 1877 (art. 3) (3). Et de même les projets de code pénal formulés en Italie en 1874 et en 1876 affranchissent de l'extradition tout fait se rattachant à un crime politique (4).

La clause par laquelle un traité, à l'exemple de la convention

(1) « L'extradition ne sera accordée en aucun cas pour des crimes ou délits politiques ou pour des faits ayant avec ces crimes une connexion immédiate. »>

(2) D. P., 1878, 4, 53: « Aucune personne accusée ou condamnée ne sera livrée si le délit pour lequel l'extradition est demandée est considéré par la partie requise comme un délit politique ou un fait connexe à un semblable délit. »

(3) D. P., 1878, 4, 95.

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(4) « L'estradizione dello straniero... non è mai ammessa per reato politico nè per fatti connessi col medesimo. » Proj. Vigliani et Proj. Mancini, art. 9, § 2. Cf. Brusa, Annuario, II, 137.

franco-sarde de 1838 (V. ci dessus), soustrait à l'extradition les délits politiques in genere, ne peut évidem ment s'appliquer qu'aux délits que nous avons appelés délits politiques relatifs : autrement, elle serait dépourvue de sens et d'utilité. En effet, les crimes purement politiques ne figurent pas dans la liste des faits à raison desquels les traités obligent les Puissances contractantes à l'extradition; or, aucune obligation ne leur incombe en ce qui concerne les faits non expressément prévus; et il serait ainsi singulièrement superflu d'ajouter à cette exclusion implicite une prohibition formelle (1).

Cette manière de voir est corroborée par les traités dans lesquels on trouve, après la disposition générale qui excepte de l'extradition les crimes et délits politiques, une clause, aux termes de laquelle l'attentat dirigé contre un souverain ou contre un membre d'une famille souveraine ne peut être considéré ni comme un crime politique, ni comme un fait connexe à un crime politique (2). Cette dernière clause serait incompréhensible si l'on ne comprenait d'ordinaire, sous la dénomination de délits politiques, au moins suivant les circonstances, les faits qui se rattachent à un délit de ce genre, pour les affranchir de l'extradition. Autrement, à quoi bon nous dire, à propos d'un attentat qui n'est en somme qu'un délit complexe, qu'il ne peut jamais participer aux immunités des infractions politiques?

L'assimilation qu'on s'accorde ainsi à établir entre le délit politique et le délit connexe éclate encore dans les conventions qui interdisent à l'État requérant de juger l'individu qui lui avait été livré pour répondre d'un crime de droit commun, à raison de crimes ou délits politiques, ou de faits connexes, commis antérieurement à l'extradition (3).

Peut-être cependant pour

(1) Cf. Hoseus, loc. cit., p. 1049 et suprà p. 38. rait-on objecter que le silence gardé par les traités sur tel ou tel délit n'empêche pas le moins du monde l'extradition de son auteur, mais qu'il rend cette extradition facultative pour l'Etat requis. Une clause expresse d'exclusion ne serait donc pas inutile; elle aurait pour effet d'empêcher le pays de refuge de donner suite à la demande de l'Etat requérant.

(2) Traité de l'Autriche-Hongrie avec le Monténégro de 1872, art. 3; traités de l'Allemagne avec la Belgique de 1874, art. 6; avec le Luxembourg de 1876, art. 6; avec la Suède et la Norwège de 1878, art. 6; avec l'Espagne de 1878, art. 6; traité franco-bavarois du 29 novembre 1869, art. 3 (D. P., 1870, 4, 13); traités de la Russie avec la Bavière de 1869, art. 6, et avec le grand-duché de Hesse de 1869, art. 6.

(3) Cf. les traités de l'Autriche-Hongrie avec la Belgique de 1881, art. 3; avec l'Italic de 1869, art. 3; avec les Pays-Bas de 1880, art. 7; avec la Suisse de 1855, art. 11; avec la Serbie de 1881, art. 3; avec le Luxembourg de 1882, art. 3.

Le traité austro-italien soulève quelques difficultés : Les deux versions italienne

Si donc, après l'extradition, le fait à raison duquel elle a été accordée se présente comme un crime connexe à un délit politique, l'extradé doit échapper à toute répression. Mais il va de soi qu'un État ne peut être tenu de livrer son hôte pour un fait qui ne peut entraîner pour lui ni poursuites, ni châtiment. Le fait incriminé apparaît-il à l'État requis, au cours de la procédure d'extradition, avec le caractère non pas d'un délit de droit commun, mais d'une infraction connexe à un délit politique, il est fondé à refuser de livrer son auteur, en s'appuyant sur la clause dont il a été parlé ci-dessus (1). Un doute

et allemande ne sont pas d'accord. Le texte italien s'exprime ainsi : « L'individuo che sarà consegnato per altra infrazione alle leggi penali, non potrà in alcun caso esser giudicato o condannato per crimine o delitto politico anteriormente commesso nè per qualsivoglia fatto relativo a questo crimine o delitto. » tandis que le texte allemand porte ce qui suit, in fine: « Noch wegen einer wie immer gearteten Betheiligung an einem politischen Verbrechen oder Vergehen. » Cette version, pourrait, semble-t-il, convenir aussi bien à la complicité prêtée à un crime purement politique qu'à un fait complexe; tandis que le texte italien paraît rendre obligatoire l'extradition à raison de ce dernier. Mais quoique cette manière de voir trouve un semblant d'appui dans la déclaration interprétative du traité, elle a peine à se défendre. Il n'est pas douteux, en effet, que la formule « ni pour faits connexes à un crime ou délit politique » se trouvait dans la rédaction primitive dont la version italienne et la version autrichienne devaient se borner à être la reproduction; mais, seul, le texte italien l'a conservée de manière à éviter tout malentendu; et d'ailleurs, on ne peut contester qu'une disposition qui excepterait de l'extradition le complice d'un délit politique, à l'égard de l'auteur principal lui-même, ne fût entièrement inutile, comme exprimant l'évidence. Pour le même motif, il faudrait admettre que dans le traité conclu entre l'Autriche-Hongrie et les royaumes unis de Suède et Norwège ces mots du texte français << ni pour une complicité pour un tel crime ou délit » sont synonymes des mots suivants insérés dans la traduction allemande : « noch wegen irgend einer Theilnahme an einem solchen Verbrechen oder Vergehen, » et doivent être entendus en ce sens que l'extradition n'est pas obligatoire pour les délits complexes.

Cf. les traités conclus par l'empire allemand avec l'Italie en 1871, art. 4; avec la Belgique en 1874, art. 6; avec le Luxembourg en 1876, art. 6; avec la Suède et la Norwège en 1878, art. 6; avec l'Espagne en 1878, art. 6; ceux conclus par la Belgique avec le Danemark en 1876, art. 4; avec l'Espagne en 1870, art. 3; avec la France en 1874, art. 3; avec le Luxembourg en 1872, art. 7; avec l'Italie en 1875, art. 3; avec la principauté de Liechtenstein en 1852, art. 6; avec celle de Monaco en 1874, art. 3; avec le Pérou en 1874, art. 8; avec la Russie en 1872, art. 11; avec la Suède et la Norwège en 1870, art. 6, et avec la Suisse en 1874, art. 3; ceux conclus par la France avec le Portugal en 1854, art. 7; avec la Suisse en 1869, art. 2; avec les Pays-Bas en 1844, art. 3; avec le Danemark en 1877, art. 3; avec le Luxembourg en 1875, art. 3; ceux conclus par la Russie avec l'Espagne en 1877, art. 4; avec les Pays-Bas en 1880, art. 6; avec l'Italie en 1871, art. 4; avec la Suisse en 1873, art. 6; avec la Bavière en 1869, art. 6. Cf. les explications présentées par la commission de rédaction d'un projet de code pénal pour l'empire russe, 1882, p. 55.

(1) Cf. Hoseus, l. c., p. 1049.

ne serait possible à cet égard que dans le cas où le traité permettrait à l'État requérant de punir le réfugié à raison des crimes politiques ou connexes commis avant l'extradition, à la condition qu'après avoir été acquitté du chef pour lequel il a été extradé ou après avoir purgé sa condamnation, celui-ci soit demeuré volontairement pendant un certain temps sur le territoire de l'État auquel il a été livré, ou y soit revenu après l'avoir quitté (1).

C'est donc dans la forme seulement, et non au fond, que les traités où se trouve l'une des clauses ci-dessus mentionnées se séparent de ceux récemment conclus par la Grande-Bretagne (2) et par les États-Unis (3), et de certains traités suisses, notamment avec l'empire d'Allemagne (art. 4), qui disent en toutes lettres (4): « Le criminel réfu

(1) Cf. par exemple le traité hispano-allemand de 1870, art. 6.

(2) Traités conclus par la Grande-Bretagne avec l'Autriche-Hongrie en 1873, art. 6; avec l'Empire allemand en 1872, art. 6; avec la Belgique en 1876, art. 7 ; avec l'Italie en 1873, art. 5; avec le Danemark en 1873, art. 7; avec le Brésil en 1872, art. 6, etc.

(3) Traités conclus par les Etats-Unis d'Amérique avec la Belgique en 1874, art. 3; avec la Suisse en 1850, art. 17; avec la Suède et la Norwège en 1860, art. 5; avec l'Italie en 1868, art. 3; avec la Turquie en 1874, art. 3; avec la France en 1843, art. 5; avec le Pérou en 1870, art. 3, et avec le Mexique en 1861, art. 6. Ces trois derniers s'expriment ainsi : « The provisions of the present treaty shall not be applied in any manner to any crime or offense of a purely political character; » tandis que dans les autres le mot restrictif purely fait défaut. Les traités avec la Grande-Bretagne, avec la Prusse, avec l'Autriche ne contiennent aucune exclusion expresse pour les délits politiques. Toutefois, en ce qui touche le premier, le président Tyler a déclaré dans son message au Sénat «< qu'il résulte de l'énumération limitative des délits passibles de l'extradition, que cette dernière n'est pas applicable aux délits politiques, non plus qu'aux faits qui se sont produits à l'occasion d'une guerre étrangère ou civile. » Clarke, p. 48.

(4) On trouve une disposition semblable dans le projet de loi sur l'extradition déposé par M. Dufaure sûr le bureau du Sénat français (Journal officiel du 16 mai 1878), tit. I, art. 3 : « L'extradition ne sera pas accordée : 1o lorsque les crimes ou délits auront un caractère politique. » La commission chargée d'examiner le projet y intercala ces mots : « (ne sera) ni demandée (ni accordée). » (Journal officiel du 17 janvier 1879). Le rapport de M. Bertauld semble limiter cette exclusion aux faits purement politiques et lui donner, par conséquent, moins d'étendue que si elle concernait aussi les « faits connexes à un crime politique. » Cpr. son discours du 3 avril 1879, dans M. L. Renault, op. cit., p. 19. Mais néanmoins il n'est pas douteux que le Gouvernement français n'a pas voulu, par cette clause, admettre un point de vue aussi diamétralement opposé à la loi belge, et autoriser sans condition l'extradition de l'auteur d'un fait connexe à un crime politique. Si M. Bernard, op. cit., t. II, p. 280 affirme le contraire, c'est qu'il fait une confusion inexplicable entre le crime politique envisagé sans le rapport de la loi pénale interne et le même crime envisagé sous le rapport de l'extradition. Que dans ce dernier cas l'expression crime politique embrasse même quelques infractions de droit commun, cela résulte pour nous avec évidence de ce motif que, s'il en était

gié ne doit pas être extradé, lorsque le fait dont il est inculpé présente un caractère politique, » et à ces derniers mots il faut donner le sens spécial qui sera indiqué ci-dessous. Mais lorsque certains traités ajoutent à cette clause l'alternative suivante: «ou, lorsque le réfugié prouve que l'État requérant a eu, en demandant son extradition, l'arrière-pensée de le poursuivre et de le frapper, à raison d'un crime ou d'un délit qui, en réalité, est politique de sa nature, ils dépassent la juste mesure; en effet, ils rendent de la sorte impossible l'extradition de celui qui, avant ou après avoir commis un crime politique, se serait rendu coupable d'une infraction de droit commun complètement indépendante de ce dernier, pourvu seulement qu'il apparaisse que l'État requérant a le secret désir de le punir pour le crime politique (1). Il serait étrange, en vérité, qu'un crime politique pût assurer à son auteur l'impunité à raison de délits de droit commun qui ne présentent avec lui aucune connexité.

A côté des traités dont il vient d'être parlé, on n'en compte qu'un très petit nombre déclarant expressément que, quoique propre aux crimes de droit commun, l'extradition ne peut être empêchée par cette circonstance que leurs auteurs sont en même temps inculpés d'un crime politique. Mais alors les traités surbordonnent l'extradition à cette condition que l'individu livré ne sera poursuivi et puni qu'à raison du crime de droit commun qu'il a commis (2). Une disposition de ce genre n'a pas sa raison d'être, dans le cas où les deux infractions ne sont pas intimement liées entre elles; nous le verrons plus tard.

autrement, il n'aurait servi à rien d'écrire dans une loi ou dans un traité une exclusion formelle que leur silence suffit à établir.

(!) D'ailleurs, il serait très difficile d'amener le gouvernement anglais à renoncer à la restriction formulée dans ses traités. Il faudrait, pour cela, tout d'abord modifier l'extradition act de 1870, dont la 3 section rend son insertion obligatoire dans tous les traités à conclure par la Grande-Bretagne. Semblable tentative échouerait du reste, en présence des notions imparfaites que le droit anglais nous présente sur le concours des infractions. Au demeurant, la restriction dont il s'agit n'offre pas d'inconvénient bien sérieux. Le Gouvernement de l'Etat requérant devrait, pour en tenir compte, s'engager formellement à ne pas poursuivre l'individu réclamé à raison d'un délit politique n'ayant aucune connexité avec le crime de droit commun sur lequel est basée sa demande d'extradition; ce qu'il ne pourrait faire, même s'il avait obtenu l'extradition d'un Gouvernement vis-à-vis duquel il est lié par un traité de la nature de ceux dont il est question ci-dessus.

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(2) A. Weiss. l. c., p. 174. Le traité austro-espagnol de 1861, art. 3, contient une disposition de ce genre. Celui du 1er octobre 1855, art. 24, conclu dans le même sens entre le gouvernement des Etats-Unis et le royaume des Deux-Siciles a cessé d'être en vigueur. Spear, The law of extradition, international and interstate. Albany, 1879, p. 43 et 374.

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